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Dans le Moyen Atlas, outre les gravures de l’oued Zireg dans la région de Taza étudiées par D. Grébenart et B. Pierret, un site d’art rupestre fut signalé au temps du Protectorat dans le massif de Tidrit, à environ 5 km de la ville d’Ifrane. Cette station fut découverte par la famille Verdier de Fès et étudiée par J. Choppy en 1952*.

Dans un relief ruiniforme, à l’extrémité Sud-Est du massif, l’abri sous-roches, exposé Nord-Est renferme à la fois des gravures, notamment des traits polis larges et minces, ainsi que des figures peintes à l’ocre rouge, surtout des lignes et des méandres. Par endroits, des gravures postérieures ont endommagés les peintures. L’abri présente sur une partie de sa longueur une vire où l’on trouve un grand nombre de polissoirs dont la longueur varie de 3 à 25 cm; leur profondeur peut atteindre 5 mm. On remarque ça et là quelques fins graffitis qui sont plus nombreux à l’endroit où n’existe pas la vire; en un point, ces graffitis, ainsi que quelques polissoirs ont entamé la peinture et lui sont donc postérieurs. L’ancien azib (bergerie), aménagé autrefois sous l’abri, est en partie détruit.

Dans son étude, J. Choppy, fait remarquer que certaines peintures, sans être absolument inaccessibles à des grimpeurs entraînés, ne sauraient être exécutés dans l’état actuel du site. Ne pouvant songer à une érosion postérieure à l’exécution des peintures qui aurait vraisemblablement tout fait disparaître, il faut penser qu’une sorte d’échafaudage fut construit.

* Choppy J. : Peintures rupestres dans la région d’Ifrane. Bulletin de la Société de Préhistoire du Maroc 5-6, 1-2, 1952.

ifrane-dessin.jpgDessins des peintures, extraits de l'article de J. Choppy

Mai 2007. Sans autre précision que ce texte, en compagnie de mon assistant Hoceine Ahalfi, je me suis rendu dans la région d'Ifrane afin de tenter de retrouver cet abri et y effectuer quelques photos. Il s'avère qu'à notre surprise le jebel Tidrit dans lequel était censé se trouver le site était complètement inconnu autour de la ville (même du service des Eaux et Forêts), par contre on nous a souvent parlé du jebel Tidrin (se prononce "tidrine") susceptible de répondre au descriptif.

Ce jebel se situe à environ 7 kilomètres de la sortie d'Ifrane par la route de Boulemane. Le "relief ruiniforme" de calcaire qui forme le petit jebel Tidrin renferme effectivement de très nombreux auvents ou abris sous-roches susceptibles de contenir d'hypothétiques gravures ou peintures rupestres. Lors de notre passage, le secteur étant fréquenté par de nombreux campement de semi-nomades avec leurs troupeaux, mon assistant, muni de photos, s'est renseigné auprès d'eux pour éviter de perdre du temps à une recherche fastidieuse dans le réseau important de couloirs quadrillant ce massif calcaire.

Première réaction : le descriptif du texte de J. Choppy et nos photos ne semblaient pas éveiller quelque chose chez les adolescents habitués à parcourir le secteur avec leurs troupeaux et à s'abriter dans les abris par mauvais temps.

Deuxième réaction : lors de leurs séjours d'été, ils nous ont annoncé voir souvent des Européens circulant en tout sens dans le massif semblant à la recherche de quelque chose...

Moyennant finance quelques-uns ont bien voulu se mettre à notre disposition pour nous conduire vers les abris qui semblaient, d'après nos descriptifs, pouvoir contenir ce que nous recherchions... Après plusieurs heures de recherche, la déception a été totale... l'abri à peintures n'a pas été retrouvé... En fait, si c'est bien le jebel qui doit renfermer "l'abri Tidrit", il faudrait pendre le temps d'effectuer une reconnaissance couloir par couloir sur toute la totalité du massif. A plusieurs personnes cela doit être possible dans la journée...

Anecdote :

Comme il est bien connu au Maroc que les "Bureaux de tourisme" locaux sont toujours bien renseignés sur les sites d'intérêt de leur région, nous nous sommes rendus à celui d'Ifrane. Nous y avons été accueillis (dans une pièce glaciale) par deux dames, emmitouflées et bien calées sur leur chaise, à qui nous avons essayé d'expliquer (en français et en arabe) ce que nous recherchions. Elles voyaient ce que pouvait être des peintures mais le mot "rupestres" leur posait une énigme évidente... Quand nous avons parlé "d'abris", éventuellement de "grottes", où pouvaient se trouver les peintures, la lumière a soudain surgit dans leur cerveau engourdi par le froid... S'ensuivit le descriptif de l'itinéraire pour rejoindre ce que nous cherchions...

Nous devions rejoindre un village se trouvant au bout de la route passant par le magnifique site touristique de la forêt contenant la "Source Vitelle" (texto sur certains panneaux), une probable relique de l'époque du Protectorat. Dans ce village nous devions nous renseigner pour nous faire conduire vers l'objet de nos désirs; ce que nous avons fait... Un monsieur s'est tout de suite présenté pour nous faire visiter la "grotte aux peintures".

Muni de notre "barda" de relevés, carnet de note, GPS, appareil photo, nous avons été conduit à quelques dizaines de mètres, à une grotte se trouvant sous une maison... Le doute, qui commençait à nous assaillir, s'est terminé par un (discret) éclat de rire quand nous avons vu les peintures, car si celles-ci étaient bien "rupestres" puisqu'elles recouvraient toutes les parois d'une belle grotte, elle étaient d'un beau style naïf représentant des thèmes de la classique mythologie orientale.

Ces "œuvres d'art", produites par le propriétaire de la maison, sont paraît-il un des fleurons des choses à visiter à Ifrane...