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C’est en 1948, que le professeur Théodore Monod, directeur de l’IFAN de Dakar, fit paraître, dans les Actes et Mémoires de la Société Espagnole d’Antropologie, d’Etnographie et de Préhistoire, un inventaire des différentes formes de monuments préislamiques du Sahara occidental. Pour la région Nord du Sahara marocain que concerne notre guide, nous présentons les formes les plus couramment rencontrées.

Le tumulus ordinaire

Parmi les formes élémentaires se classent les tumulus simples. Très nombreux au Maroc, ils sont soit isolés, soit en petits groupes, mais parfois ils constituent de véritables nécropoles où ils se dénombrent par centaines, voire par milliers. Ces types de sépultures sont souvent connus des populations. Ils sont désignés par diverses appellations : Kerkour / Keraker (pluriel), Rjam / Le Rjam, Imirch / Imarchen - Amariyi / Imariyne, et autrefois du nom de brouj ou brourdy au Sahara occidental (signalé par le Français Camille Douls). Ces tombeaux sont attribués, par les populations autochtones, à des populations étrangères, souvent juives ou païennes. Ils ont rarement fait l’objet de fouilles scientifiques et sont très uniformes dans leur aspect extérieur : un amas de pierres, généralement de forme conique ou tronconique, pouvant recouvrir des aménagements intérieurs différents. Certains tumulus cachent une chambre funéraire entièrement creusée dans le sol dont les parois sont formées par des dalles posées verticalement. La couverture de la chambre est assurée par plusieurs assises de dalles. Le nom de kerkour est plutôt donné par les indigènes aux tas de pierres élevés au passage des cols ou sur des hauteurs; de construction parfois récente ils peuvent être liés à des pratiques superstitieuses.

Les formes évoluées

Ce sont des monuments qui présentent des aménagements architecturaux apparents de l’extérieur ou qui sont liés à des pratiques cultuelles.

Les bazinas

Sont appelés bazinas tous les tumulus qui ne sont pas de simples amoncellements de cailloux ou de galets, tous ceux qui ont un aménagement extérieur même réduit. Ce type de sépulture se retrouve presque partout dans le Maghreb et le Sahara. Leur nombre, leur forme et leur présence dans les nécropoles, mêlées à des tumulus, ont poussé de nombreux auteurs à ne pas juger utile de les distinguer de ces derniers. Un autre type de bazinas, celui à degrés quadrangulaire (ou gradins), est assez répandu au Maroc.

Les tumulus à chapelle

Leur originalité réside dans l’aménagement intérieur de galeries et cellules multiples disposées le long d’un ou deux axes; la sépulture située au centre, n’a aucune relation avec ces galeries. De ce fait, on peut admettre que cet aménagement intérieur était réservé au culte funéraire. Ces monuments, bien qu’ils présentent dans leurs rites des caractères archaïques tels que le décharnement antérieur à l’inhumation, sont vraisemblablement de période tardive. Le plan cruciforme des chapelles, répandu, et divers indices, permettent de penser que les populations qui ont construit ces monuments pouvaient être de religion chrétienne. Fraîchement christianisés, ces Berbères, tout en adoptant l’emblème de leur nouvelle religion, ont continué à inhumer leurs morts selon leur traditions ancestrales.

Les tumulus à antennes ou à bras

Les archéologues donnent le nom d’antennes à des structures étroites et allongées, sortes de bras qui prolongent ou précèdent certains monument protohistoriques en pierre sèche. Soit parce qu’elles y ont été mieux conservées, soit parce qu’il s’agit d’un fait culturel, les antennes sont surtout connues dans les régions sahariennes. A la base du tumulus sont accolées une ou deux branches. Les plus fréquentes sont disposées en V; elles s’écartent de l’adebni en déterminant un espace en forme d’éventail. Un monument à bras d’inégales longueurs n’est pas rare. Les autochtones donnent le nom de hillal à ces monuments, ce qui signifie “croissant”. A noter qu'il existe d'autres structures préislamiques qui ne comportent pas de tumulus central d'où partent les antennes.

Les monuments à trou de serrure

En général, la tête (ce que nous avons appelé le sommet) est composée d’un modeste tumulus d’où part un goulet ou un couloir enserré par deux lobes (arrondis), ou par deux “ailes de mouches”, appellation venant de Mark Milburn qui représente effectivement bien la forme de deux lobes allongés. La bordure est faite de petits galets, souvent allongés, plantés dans le sol. La surface du monument peut être parfois entièrement garnie de galets plus petits; en règle générale c’est plutôt les alentours du tumulus qui sont empierrés, parfois par des galets plus gros que ceux de la bordure. L’appellation couloir détermine le partage complet du monument en deux moitiés alors que le goulet se termine en cul de sac. Comme pour les tumulus et monuments à antennes, l’orientation générale des lobes est Nord-Est avec plus ou moins de variations au Nord ou à l’Est. Certains de ces monuments peuvent avoir deux goulets avec les bordures de lobes qui se croisent, ou deux et trois couloirs pour les monuments en ailes de mouche.